note : non publié en juillet 2021
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Introduction
Le 28 juin 2020, près de 15 000 personnes ont voté pour Louis Aliot et il est devenu maire de Perpignan. Pour ma part, modeste électeur, je n’étais pas neutre et je ne voulais pas le devenir. Ne pouvant voter « ni pour le cancer, ni pour la peste », j’ai voté blanc. Je ne pouvais pas oublier d’où venait Perpignan.
Avant Aliot la mairie adorait l’Algérie coloniale : inauguration en 2003 de la stèle pro OAS au cimetière du Vernet, 2012 ouverture du Centre de Documentation des Français d’Algérie, 2017 intention de nommer une rue d’un membre de l’OAS. L’ancienne municipalité était soupçonnée de clientélisme voire de truquer les élections. En décembre 2011 le tribunal condamne Georges Garcia pour l’affaire des « chaussettes », la « soustration de bulletin de vote » lors de l’élection de 2008. Concernant la culture, la mairie laisse en 2015 se fermer l’Ecole d’Art de Perpignan. Le maire de Perpignan (et président de la communauté urbaine) avait sa part de responsabilité dans l’effondrement économique de la ville.
En 2019 au moins 15% de chômage. Un quart des commerces du centre-ville fermés, et 60% sur la rue des Augustin et 64% rue de la Fusterie. Ville concentrant neuf des dix quartiers prioritaires du département. Avec la pauvreté, se développe le trafic de drogue et des criminels de plus en plus armés. Depuis des années les faits divers relatent la circulation d’armes de guerre comme la kalachnikov. Et les guerres de gang sont de moins en moins « discrètes ».
Janvier 2020 une personne se réfugie dans la journée dans une école primaire pour échapper aux coups de feu. Une semaine avant l’élection en juin, en pleine après-midi, deux personnes blessées par arme à feu dans le quartier St Jacques. La ville de Perpignan a essayé depuis 2003 une action continue sur le centre historique avec l’aide de l’Agence Nationale d’Amélioration de l’Habitat.
Janvier 2014, un immeuble s’effondre dans le quartier St Jacques. Et les années suivantes de nombreux autres sur le point de s’effondrer. Au travers des publications dans l’Archipel Contre-Attaque ! LIEN (la dernière) j’ai proposé de nombreuses informations concernant des thématiques de la sécurité à l’économie. Je vous propose ci-dessous un résumé et une analyse de ces thématiques.
**La politique de sécurité de la première année
Tout commence avec la déclaration sur la « voyoucratie » au quartier des Oiseaux. Puis 6 mois d’annonces et de décisions de maire. Suivis de 6 mois de décisions du conseil municipal. En juillet 2020 après le coup de com aux oiseaux le nouveau maire fait un arrêté contre les incivilités. En septembre nouvel arrêté contre les épiceries de nuit suspectées de divers trafics. Première ouverture de police municipale au Palmarium. En novembre nouvelle organisation de la police municipale avec une police de nuit. L’année 2021 est une série de conseils municipaux finançant la police municipale. En février recrutement de 27 policiers qui s’ajoutent aux 157 policiers municipaux (dont 153 armés) soit après recrutements 181 agents dont 177 armés. En mars le conseil municipal de Perpignan votait le retour du partenariat, abandonné en 2017, avec Voisins vigilants et solidaires, entreprise marseillaise qui met en place un réseau de surveillance citoyen en lien direct avec la police municipale via un site internet et une application. Selon le directeur de la police municipale le projet est de remodeler en 30 à 40 zones, Nord, Est, Ouest, Centre, ou des quartiers (Saint-Mathieu où le Bas Vernet). Au mois de mai, vote pour le financement de 24 caméras s’ajoutant aux 305 caméras et l’achat 35 gilets pare-balles. La majorité et l'opposition se réjouissent de l'augmentation du nombre caméras. Ce qu’ils ne diront pas aux Perpignanais c’est que les citoyens de la cité catalane paieront plus de 80% de la dépense globale soit 648 665 euros. A la fin du mois, pour une période initiale de 12 mois commande d’armes s’élevant 138 000,00 euros. Après 6 mois d’annonces en juin, Louis Aliot inaugure deux postes, ouverts de 11h à 15h, l’un quartier de la gare, l’autre au Moulin à Vent. La présence de la prévention dans cette politique de sécurité est plus confuse à l’instar des connaissances du maire sur la situation. Au mois de mai le maire se décide, curieusement, à présenter le service de médiation urbaine qui sur le terrain existe depuis le 14 janvier 2021 avec les 14 médiateurs. Au mois de mai la ville annonce le personnel de la police municipale est venu sensibiliser les élèves de CM2 aux valeurs de la République. Tout porte à croire que Louis Aliot mène une politique de sécurité à Perpignan sans une réflexion global, sans avoir fait un état des lieux. Au mois de septembre 2020 il annonçait un « comité d’expertise sécurité à partir du 1ier ’octobre/ " observatoire de l'insécurité ». Silence pendant des mois. En janvier 2021, une polémique pousse la mairie à évoquer un diagnostic en cours. En fait rien n’est en cours. Pour un montant que nous n’avons pas le droit de connaitre, le conseil municipal en mai autorise le financement d’une prestation intellectuelles et de conseils dans le domaine de la sécurité auprès de la société XR. Le dirigeant de cette société est Christian de Bongain/ Xavier Raufer un ancien militant d’Occident. Un bilan de sa politique pourrait prendre en compte ses promesses de campagne sur la sécurité. Force est de constater qu’il n’a pas lésiné ses efforts sur ses promesses de répression et de surveillance. Presque tout est en route à la fin de première année.
La prévention n’était pas la priorité comme la relance du CLSPD. On peut s’interroger comment va se mettre en place la « cellule de lutte contre les discriminations », ou le « le lien inter-services pour régler avec humanité les problématiques résultant de l’augmentation du nombre de SDF », ou la « coordination des actions de prévention, de repérage précoce et de prise en charge des addictions et particulièrement pour les jeunes ». Il est fort à parier que cette mise en place ne sera pas ébruitée vers son électorat traditionnaliste.
**Une communication municipale omniprésente
De la conférence de presse au Facebook de la ville de Perpignan, la communication du maire Louis Aliot et de sa mairie est omniprésente. Il est impossible de tout suivre. Il est également très difficile de la schématiser simplement. Au cours d’une semaine le Facebook municipal annonce aussi bien l’artisan d’une ruelle qu’un projet de plusieurs millions d’euros. Néanmoins il est possible de proposer une lecture chronologique de certaines tendances et de souligner le contraste entre les annonces et la réalité. Au cours des 6 premiers mois on pourrait remarquer les très nombreuses annonces sur la sécurité, et plus discrètement, la communication dans une stratégie de dédiabolisation. Certains analystes prédisaient qu’à partir du moment où le FN ne ferait plus peur à la communauté juive le parti entamerait une forme de normalisation politique. Le FN/RN entamerait une dédiabolisation. Un faisceau d’indice à Perpignan pourrait appuyer l’idée de stratégie de dédiabolisation à Perpignan. Des commémorations au tag antisémite effacé, en passant par des vœux à des fêtes juives, la communication municipale ou de Louis Aliot indique une volonté de plaire à la communauté juive. D’autres évènements contrastent avec les valeurs du vieux FN comme l’inauguration du local pour les victimes LGBT ou de violences familiales. La période de mars à début mai 2021 contraste avec les positions jusque là, peu clivantes, de Louis Aliot maire. Au mois de mars le maire décide de déterrer la Guerre d’Algérie avec son exposition. Au cours du mois d’avril Louis Aliot déclare repeindre en bleu-blanc-rouge les quartiers. Fin avril quelques jours avant le lancement de campagne électorale du RN, les grandes avenues perpignanaises sont arborées de drapeau tricolores. C’est aussi une période où la religion catholique émerge dans la communication. Hormis la crèche, il était discret sur le sujet. Mais à la fin du mois de mars s’impose un nouveau logo à forte connotation religieuse. Louis Aliot est aussi un maire qui va visiter personnellement les écoles catholiques. Les mois qui ont suivis pourraient être interprétés comme de la « valorisation » ou de la « normalisation » par la communication. En effet dans la nouvelle revue il est question de « ville verte » ou de « passion du patrimoine ». Cette « valorisation » dans la communication contraste avec la réalité. Fin 2020 le futur nouveau square Jeantet Violet, lancé par son prédécesseur est présenté comme une forêt urbaine. En réalité cette «forêt » est très minérale, entourée de quelques arbres et composée d’un gazon qu’il faut arroser. On peut évoquer aussi des services qui continuent à recouvrir le pied des arbres d’un revêtement synthétique. **Recrutement et nomination à la mairie de Perpignan De juillet 2020 à février 2020 Louis Aliot recrute ses principaux directeurs administratifs pour appuyer sa politique. D’autres nominations permettent de distinguer certains réseaux. En juillet c’est la nomination du directeur de cabinet bien connu pour son passage au conseil départemental et précédemment à la municipalité Alduy. En septembre recrutement d’un directeur du protocole membre des Républicains. Au mois d’octobre, découverte du nouveau directeur de la police municipale. Mais le mois de janvier prend une autre coloration avec l’arrivée du directeur de la communication, un ancien journaliste de Valeurs Actuelles et Minute. Et en février 2021, en provenance d’Angoulême le nouveau Directeur Général des Services (DGS). La compagne du maire, déjà employée par la mairie, rentre en juillet au Conseil d’Administration du théâtre de l’Archipel avant de se concentrer sur le service communication où elle jouera un rôle d’intermédiaire dans l’affaire du nouveau logo. Maurice Halimi frère du président de la communauté juive de Perpignan et membre des Républicains devient en juillet président du théâtre de l’Archipel. De nombreuses nominations dans des commissions permettent au nouveau maire de tisser son réseau dans les institutions (enseignements, culture, entreprises…). En revanche certaines promesses de recrutement tardent à s’effectuer comme le manager de centre-ville ou le déontologue.
**Aliot à la Communauté urbaine de Perpignan Méditerranée Métropole
En juillet 2020 la communauté urbaine est composée majoritairement de maires Républicains. Ils nomment l’un d’entre eux comme président. En raison du poids de Perpignan Louis Aliot reçoit en juillet la 5evice-présidence. En août il récupère la délégation de la politique de l'habitat et devient un des représentants au sein des conseils d'administration de l'office public d'HLM Perpignan Méditerranée. Finalement au mois d’octobre Louis Aliot et l'adjointe au logement Marion Bravo intègrent le bureau composé de sept membres conseil d’administration de l'Office pour l'habitat. Les élus de Perpignan ont en revanche refusé des fonctions dans les différentes commissions dont la présidence concernant les attributions. La Communauté urbaine de Perpignan propose une information de ses décisions d’accès difficile. Le rôle précis du maire de Perpignan dans les dossiers de l’intercommunalité reste à éclaircir. On peut supposer que les élus Républicains ne veulent pas faciliter l’intégration de leur principal concurrent à droite. Louis Aliot devra négocier beaucoup, pour obtenir peu pour Perpignan. On peut souligner des sujets très médiatisés et restés sous silence par le maire de Perpignan comme l’installation d’Amazon et surtout les licenciements au Conservatoire de Perpignan.
**Une politique culturelle à Perpignan sous fond de contraintes sanitaires
Les contraintes sanitaires presque tout au long des 12 mois empêchent d’analyser une construction de projet culturel pour la ville. Mais certains évènements culturels pourraient être inclus dans le décryptage d’une stratégie de dédiabolisation. Les jauges de l’été 2020 permettent certains évènements mais annulent d’autres. En août l’adjoint à la culture évoque que Perpignan peut devenir une destination dalinienne. Fin octobre, la ville rentre dans un nouveau confinement qui inclut la fermeture des musées. Interdiction qui sera temporairement violée au mois de février 2021 dans un grand coup de communication. Si les musées sont vite fermés, les jours qui suivront seront marqués par la pose de gros blocs blancs installés destinés à des artistes locaux pour du street-art. Le mois de mars est beaucoup plus clivant avec l’"exposition de rétablissement de la vérité concernant la guerre d'Algérie". L’adjoint à la culture évoque au mois d’avril «l'identité méditerranéenne de Perpignan". Ce qui pourrait rappeler l’ancien maire. Le mois de mai est le début d’un déconfinement, occasion pour un autre coup de com, avec quatre lieux culturels gratuits pendant un mois. Et au mois de juin c’est la mystérieuse « installation » du Comité Consultatif de la culture. On peut terminer sur les polémiques du Centre d’Art Contemporain Walter Benjamin qui ne portera plus ce nom faute d’accord avec la famille. Quant au devenir du lieu, c’était la grande confusion. Le 1er adjoint évoquait la vente à une chaine italienne de prêt à porter féminin.
**Mobilités et aménagements
La municipalité Louis Aliot continue une politique pro voiture tout en se différenciant sur le financement du stationnement. Concernant le vélo l’année a été marquée par une polémique sur le projet de piste sur la Basse et les aménagements de l’avenue Albert Camus. Depuis novembre 2020, l’année est jalonnée de périodes de stationnement de surface temporairement gratuit. Concernant les grands projets d’aménagements, Louis Aliot a inauguré un ensemble de projets lancés par l’ancien maire comme le square Jeantet Violet ou l’agrandissement du Parc Sant Vicens. En revanche c’est aussi l’abandon de projet onéreux comme le Tiers Lieux aux anciens abattoirs ou la salle sport et spectacle du Vernet. Des alternatives devraient émergées en agrandissant le Palais des Expositions et le Parc des Sports. Il est fort probable que les projets de campagne de Louis Aliot candidat, soient issus des services techniques de la ville. D’où la ressemblance des projets des candidats, de l’ancien et du nouveau maire, au sujet de la requalification de l’entrée de ville. Une entrée de ville au nord de la Têt mais très au sud du Haut Vernet la partie nord de la ville.
**Aliot et la gestion interne de la mairie
Beaucoup de questions se posent sur la gestion interne par le nouveau maire. On peut apporter quelques réponses. Le candidat à la mairie promettait depuis 2014 un audit sur la gestion de l’ancienne mairie. Après l’élection l’annonce d’un audit se réitère mais comme un mirage… Le nouveau maire reconnait que son arrivée a généré des tensions entre ses employés municipaux et qu’il s’est résolu à mettre en place une charte de courtoisie. La communication des opérations « coup de poing » pour le nettoyage des rues est récurrente. Son application devait provoquer des tensions dans ces services. En février 2021 le syndicat Sud dénonce la réorganisation "à marche forcée" du service de la propreté urbaine et menace de grève. Concernant la relation avec ses conseillers municipaux, de nombreuses informations ou décisions sont centralisées au cabinet du maire avant d’être transférées au maire de quartier. Bernard Reyes au moment de sa démission évoque une censure pour communiquer vers son maire. Pour finir on notera que le nouveau maire est arrivé en augmentant son indemnité et invite beaucoup en augmentant de près de 40 000 euros les frais de réception en plein confinement.
**Les élections cantonales
Louis Aliot était très actif pendant les derniers mois pour recréer son « Perpignan en grand » à l’échelle du département. Il recrute également des candidats chez les Républicains. Certains de ses conseillers municipaux se présentent et d’autres confient la campagne à leur frère ou sœur. Les documents de campagnes sont imprimés à Limoges. L’abstention était anticipée et même celles des bénévoles. Mais les interdictions du code électoral ne sont pas maitrisés car au mois de mai sa majorité municipale a voté une rémunération des bénévoles. Impréparation qui a conduit les services à contacter au dernier moment les associations pour inciter au sens civique. **Quoi d’autres? Économie, logement, le sport Juste avant l’élection de Louis Aliot la ville de Perpignan traversait une nouvelle difficulté économique avec le confinement. Après l’élection le nouveau maire emploie certaines aides (taxes terrasse, ticket restaurant, stationnement gratuit) pour les commerçants du centre-ville. Au mois de février la mairie préempte 27 commerces de la rue des Augustin en faillite avant l’arrivée du covid. Dès l’automne le conseil municipal met en route un outil « bon marché » pour lutter contre le tristement célèbre habitat indigne de Perpignan : le permis de louer. Un des changements marquants est le nouveau club de basket de Perpignan. On ne sait pas si le club sera rayonnant pour Perpignan, mais Louis Aliot pourra se targuer de lancer un nouveau club et d’effacer l’image des controverses judiciaires de l’ancien club. Pour revenir à l’économie on rappellera que les managers de centre ville ne semblent pas se battre pour officier à Perpignan. En outre, la surprenante promesse d’un dispositif « Territoire Zéro Chômeur » à Perpignan semble se faire également attendre. D’ailleurs il y a un mystérieux porteur de projet qui déroge à l’habituel participation d’ATD Quart Monde.
**Conclusion
Le nouveau maire arrive dans une ville délaissée depuis des années où croît : effondrement de bâtiments, saleté des rues, chômage, faillite de magasins, pauvreté, trafics de drogues, circulation diurne d’armes…
Au bout d’un an, on constat que Louis Aliot a mis beaucoup de moyens pour appliquer presque toutes ses promesses concernant la sécurité et le nettoyage.
Tel un Nicolas Sarkozy, Perpignan se retrouve avec un hyper-maire en constante communication.
Ses recrutements sont, parfois non clivants, dans la droite classique et parfois marqués extrême droite. Concernant la gestion interne il apparait une centralisation des décisions autour du cabinet du maire. Dans l’intercommunalité il est isolé.
La politique culturelle, masquée par les restrictions, révèlent des aspérités contradictoires : entre exposition orientée sur l’Algérie et des musées gratuits. La vision des mobilités est centrée sur la voiture et les aménagements sont globalement dans la continuité de l’ancien maire.
La politique économique est limitée principalement à réagir aux difficultés inhérentes au confinement.
Les élections cantonales 2021 se sont révélées un échec pour reproduire la victoire de Perpignan à l’échelle du département.
Certains aspects de la politique de Louis Aliot peuvent être considérés plus démocratiques (diffusion du conseil municipal) ou sociaux (musées gratuits) que son prédécesseur. Une partie de son électorat pourrait considérer qu’il fait une politique de droite classique voire centriste. La classe moyenne perpignanaise satisfaite d’une petite amélioration, dans un scénario du maintien de 50% d’abstention et de 30 000 non inscrits, pourrait réélire en 2026 Louis Aliot sans soutenir son parti. Mais c’est faire abstraction, dans les 5 prochaines années, des conséquences des futures crises économiques et climatiques.