19 May
19May

La médiatisation du "Printemps des libertés » ( lire mon analyse récente  ) a médiatisé une Perpignanaise : Colombe. Médiatisation des propos de la Perpignanaise qui ont été suivis de l’annonce de son recrutement par la mairie de Perpignan. 

A la lecture de ”Perpignan sous mandat RN” on peut s'interroger sur la pratique de recrutement de la mairie et sur les relations dans et hors de cette mairie RN. 

Pour commencer nous reviendrons sur les analyses autour de la polémique de Colombe, ce qui permet de mettre en lumière la mauvaise gestion historique du territoire et leurs conséquences politiques. 

Finalement nous reviendrons sur les relations depuis plus de 3 ans entretenues par le maire RN dans et hors de la mairie.

**La médiatisation de Colombe : la polémique du 1ier mai, l’annonce du recrutement et l'abandon des élites

*Meeting du RN à Perpignan le 1ier mai 2024

Selon la presse, le 1er mai 2024, Colombe était présente au meeting du RN, pour écouter Louis Aliot, Marine Le Pen et Jordan Bardella. C’est dans les couloirs du Palais des Congrès de Perpignan que Paul Larrouturou a questionné Colombe pour les réseaux sociaux de TF1. Vue plusieurs millions de fois, la vidéo a entraîné une polémique autour des Restos du cœur.

*L’annonce du recrutement par la mairie de Perpignan pour juin 2024

Le 7 mai 2024 le Facebook de Louis Aliot annonce que 

« J’ai reçu ce matin #Colombe en mairie de #Perpignan. Cette dame a un très grand cœur. Nous allons l’aider et elle commencera au CCAS de la ville dès le mois de juin. Son cas n’est pas unique et il faut continuer à se battre pour aider les plus vulnérables de nos compatriotes. » . 

-La communication sur l’émotion 

Louis Aliot communique en insistant sur son « empathie » envers cette personne française : «  dame a un très grand cœur », et «  aider les plus vulnérables de nos compatriotes ». 

*Colombe : un symbole de l’abandon des  élites? 

-Une histoire de l’abandon de Perpignan

L’introduction de « Perpignan sous mandat RN » revient sur les causes de l’élection de Louis Aliot dont les décisions négatives des élites locales depuis des décennies. 

Selon les historien à partir des années 1960, le système politique à Perpignan se détourne de plus en plus de l'intérêt général

Le système clientéliste sclérose, selon eux, le milieu politique. Les réseaux clientélistes noyautent la société locale, créent une opposition à l'installation d'acteurs économiques et laissent peu de place dans la vie politique aux nouveaux arrivants

Les chercheurs considèrent aussi que Jean Paul Alduy mène une politique d'urbanisme bien engagée mais avec peu de développement économique. Ils sont unanimes sur le constat d’une absence de schéma de développement économique. 

Selon les historiens, Jean Paul Alduy substitue aux méthodes clientélistes traditionnelles une approche communautariste de l'électorat fondée sur l'appartenance religieuse, tout en maillant la ville de commissaires de quartier et de mairies annexes. L'année 2008 est marquée par la « fraude à la chaussette » au cours de l'élection municipale. 

Les chercheurs observent aussi qu’en l’absence de politique d’habitat avec un clientélisme politique actif, les quartiers du centre ancien cumulent les handicaps. En outre, certains quartiers deviennent de plus en plus pauvres et les écarts se creusent. Les historiens relèvent aussi que l'entrée dans le XXIe siècle donne l'image d'une ville en crise avec des violences urbaines et une paupérisation avancée. Contraste entre population aisée minoritaire et population en grande difficulté. les chercheurs précisent que l'hyper concentration de la pauvreté coche ici non seulement tous les critères mais encore dans de fortes proportions : revenu médian bas, taux de pauvreté, chômage, délinquance, minimas sociaux, problèmes sanitaires et mal logement. Les chercheurs décrivent aussi la dégradation en termes de logements indignes, d'illettrisme, de déscolarisation et de déclassement social sur fond de désintérêt pour les problèmes de la population gitane. On notera que ces accumulations de difficultés créent des tensions sociales pouvant exploser dans des circonstances particulières. Par exemple, l'année 2005 est marquée par de graves émeutes faisant suite à des combats entre Gitans et Maghrébins. 

En ce mai 2024, David Giband, maître de conférences à l’université de Perpignan, met en perspective cette polémique autour de Colombe avec « les élites locales, aussi bien politiques qu’économiques, ont abandonnées » « ces petites gens ».

-L’analyse de David Giband

Le 13 mai 2024 la presse  interroge David Giband. Le chercheur souligne le choix des élites, de la la rente du soleil : « Ces 50 dernières années, l’État n’a pas été très présent. Et ne s’est pas beaucoup inquiété du sort de ce département. Les Pyrénées-Orientales sont restées aux mains des élites qui n’en ont pas fait grand-chose. Si ce n’est faire perdurer la rente du soleil. » 

Le département et Perpignan sont minés par la pauvreté (lire ma synthèse ). David Giband rappelle en ce mai 2024 la situation difficile de Perpignan, une ville « repoussoir »

«la ville centre Perpignan affiche un taux de pauvreté de 32%. Un territoire qui attire en moyenne 4.000 personnes chaque année. Ce flux de population se divise en trois segments, selon David Giband. Un tiers de précaires, bénéficiaires des minima sociaux ; un tiers de retraités souvent modestes. […] Et enfin le dernier tiers concerne les actifs. Mais qui ne restent pas, faute de trouver un emploi pour leur conjoint. ». 

Selon le maître de conférences à l’université de Perpignan les élites locales font le «  lit des populistes »  qui donnent le beau rôle au RN pour dénoncer « le système qui assigne dans l’assistanat »: « Cela fait 20 ans que c’est comme cela. Mais désormais, les électeurs du Rassemblement national n’hésitent plus à le dire », confie-t-il. On ne dénonce plus « les assistés », mais « le système qui assigne dans l’assistanat ». 

Le chercheur souligne que des électeurs RN au RSA ne veulent pas être assignés dans l’assistanat : «On a beaucoup dit que les électeurs votaient RN parce qu’il y avait trop d’assistés, d’étrangers. Or là, on voit que ce sont ces petites gens qui votent RN parce qu’ils ne veulent pas être assignés dans l’assistanat.». 

Selon David Giband, Colombe incarne aussi la figure emblématique de la déclassée, qui aide les plus pauvres qu’elle : « Colombe incarne aussi une figure emblématique, celle de Jeanne d’Arc. Car même déclassée, elle aide les plus pauvres qu’elle. « C’est un symbole très puissant ». 

-Colombe : exemple perpignanais du torytelling de ces femmes devenues cibles électorales du RN

 L’article revient sur l’ouvrage aux éditions Les Échappées de Nicolas Lebourg, spécialiste des extrêmes droites qui expliquait en en 2016 le storytelling de ces femmes devenues cibles électorales de Marine Le Pen dans le vide laissé par la gauche : 

« La gauche ne parle des femmes que pour des questions sociétales. Or, on aime bien se faire peur, mais il n’y a pas aujourd’hui de menace sur la contraception ou l’avortement en France ! Par contre, la social-démocratie ne s’occupe pas du cas de toutes ces femmes à temps partiel, véritable variable d’ajustement du système économique ». 

**Un maire en relation dans et hors de la mairie

Les recrutements de directeurs sont peu médiatisés mais certains sont récurrents en raison des vacances. 

Louis Aliot recrute rapidement le premier directeur de cabinet (Stéphane Babey) et le deuxième sera congédié à la fin de  la troisième année. Le 4 octobre 2020 la presse précise que Sylvie Clerget-Beaulieu militante RN, est
collaboratrice de cabinet.

Le directeur des relations publiques et le développeur du Centre Ville, ne font pas parler d’eux. 

-L'opacité autour de la direction de la communication de communication 

En 2021 c’est le recrutement d’un directeur de la communication, issu de Valeurs Actuelles. Il part au bout de quelques mois et son poste et toujours vacant à la fin de la troisième année. Les fonctions sont occupées par l’adjointe de direction, également femme de Louis Aliot. (écouter la vidéo du CM de 2023 ).

Au cours de la deuxième année, le directeur du Théâtre de l’Archipel apprend son « licenciement » et son poste reste vacant pendant un an. Après des mois de conflit entre les collectivités partenaires et la mairie de Perpignan, le ministre de la culture accepte la nomination de l’ancienne adjointe proposée par Louis Aliot. 

-Recrutement de criminels : Mohamed Bellebou 

Selon la presse : 

"Une belle liste qu'on clôt avec son ancien assistant parlementaire, Mohamed Bellebou, embauché au service proximité. Ce dernier a été condamné en 2010 à quatre mois de prison ferme pour avoir séquestré et menacé un élu PS avec un engin explosif factice". (Source : l'Empaillé automne 2023 p5).

Plus récemment il a fait polémique pour ses propos homophobes sur les réseaux.


-Les relations du nouveau maire avec les employés municipaux 

Peu d’informations sont médiatisées sur les relations du nouveau maire avec les employés municipaux. 

Au course des premiers mois, Louis Aliot met en place une « charte de courtoisie » pour, semble–t-il, « faire baisser les tensions ». 

En outre, on peut établir une relation entre les thématiques clés (propreté, sécurité) du candidat et les préavis de grèves. La première année, se déclenche de préavis de grève concernant le service propreté urbaine. Puis en deuxième année, c’est autour de la brigade municipale de nuit. On notera aussi un préavis de grève contre la "privatisation de crèche" (article).

Du 12 au 18 juillet 2023, la presse mentionne un ensemble« d’indisponibilités » et départs des directions de la mairie (services techniques, rénovation urbaine, culture). L’article mentionne aussi qu’« Une valse des chefs de service qui serait liée aux interventions d’André Bonet et de Véronique Aliot ». Côté employés, il y aurait de la déception dans la mesure où certains pensaient sortir du clientélisme et du favoritisme de l’ancienne municipalité, mais il y aurait beaucoup de conflits en interne en parallèle de pas ou peu de dialogue social.

*Les relations au sein du conseil municipal 

La majorité municipale formée autour de Louis Aliot a été marquée par des départs et des arrivées polémiques. Au cours de la première année, apparaît le départ de Bernard Réyes. Et cette troisième année, c’est autour de Charlotte Caillez de démissionner. La deuxième année, est marquée par le déplacement venant de la minorité vers la majorité Aliot, de Jean Casagran et Jean-Luc Antoniazzi. Ce dernier, avait fait polémique, en diffusant au cours du conseil municipal, des rumeurs de prières musulmanes dans une église. 

Plus récemment, le 27 octobre 2023 Marie Bach a révélé sa décision de quitter la majorité pour rejoindre la minorité municipale (note : Louis Aliot ne nommera pas un nouvel adjoint aux finances et prend lui-même en charge la délégation, comme il l'a fait pour la sécurité).
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*Les relations avec les institutions

La nomination d’une nouvelle personne pour la direction du Théâtre de l’Archipel a révélé une certaine incapacité à s’entendre avec les institutions partenaires

Serge Regourd dénonce le

« mépris des règles juridiques et éthiques et un tel mépris de candidats auditionnés qui se sont investis et que vous avez piégés dans un jeu de dupes ".

Côté institutionnel, le cas le moins médiatisé mais le plus édifiant est celui de la préfecture, Hormis les échanges tendus autour des meurtres estivaux, il y a très peu de traces dans la presse (en réponse à la mairie en aout 2021 la préfecture répondra "Nous mettons tous les moyens dont on dispose dans la lutte contre l’insécurité à Perpignan mais on doit s'inscrire dans la durée en concertation étroite avec les différents acteurs du territoire, en particulier avec la mairie qui a un rôle essentiel en la matière, poursuit le secrétaire général.  ". 

En revanche, David Giband a publié dans une revue spécialisée, certains des griefs des agents préfectoraux contre le maire Louis Aliot. Ils notent « un fable intérêt pour l’habitat, l’éducation prioritaire et l’économie ». Ils considèrent que Louis Aliot est « suiviste » voire pratique     « la chaise vide ». Et qu’il « n’agit pas» en attendant que l’État le « victimise » (lire David Giband « Les Pyrénées-Orientales : du territoire d’enracinement au territoire d’établissement du Rassemblement national » Dans Hérodote 2022/4 (N° 187), pages 129 à 149 ».).

 **En guise de conclusion

La polémique autour de Colombe nous a amené dans un premier temps à analyser la communication de Louis Aliot puis dans un second temps à élargir le propos, à l’arrière fond territorial, avec l’abandon historique des élites. Finalement le recrutement de Colombe nous a permis d’explorer la question des recrutements et nominations dans la mairie et les relations dans et hors de la mairie. 

Louis Aliot communique sur Colombe en insistant sur son « empathie » envers cette personne française. Elle est l’exemple perpignanais du torytelling de ces femmes devenues cibles électorales du RN :« les assistés », mais que « le système assigne dans l’assistanat », et Colombe incarne aussi la figure emblématique de la déclassée, qui aide les plus pauvres qu’elle. 

Les élites locales aussi bien politiques qu’économiques, ont abandonnées » « ces petites gens », au profit de la rente du soleil, et font le « lit des populistes » qui donnent le beau rôle au RN pour dénoncer « le système qui assigne dans l’assistanat ». 

Concernant les recrutements pendant 3 années différentes des directeurs changent dont celui de cabinet. Il faut souligner qu’il règne une certaine opacité autour de la direction de la communication. Les promesses de sécurité et de propreté semblent avoir crée des pressions internes. La presse a évoqué l’été 2023 des mouvements de départs de directeurs. 

Finalement les relations avec les collectivités locales peuvent être négatives. Concernant la préfecture, Louis Aliot est considéré comme « suiviste » voire pratiquant « la chaise vide ». Et qu’il « n’agit pas» en attendant que l’État le      « victimise ».

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